Parce que gérer la crise et les pénuries ne suffit plus, les élus de la Gauche combative dénoncent un budget 2022 sans perspective

Parce que gérer la crise et les pénuries ne suffit plus, les élus de la Gauche combative dénoncent un budget 2022 sans perspective

La séance du Conseil départemental du 10 mars dernier a été marquée par l’examen du budget départemental pour l’année 2022, mais c’est sur ce même projet de budget que les élus de la Gauche combative, communiste et républicaine se sont fortement démarqués. Joachim MOYSE rappelant notamment que « se contenter de bien gérer une administration ne suffit plus. Il s’agit au contraire de déterminer en quoi une collectivité locale souveraine, dirigée par des élus, peut agir concrètement pour aider au quotidien les gens au-delà des réponses qui existent déjà. Si ces réponses étaient déjà suffisantes, si elles étaient réellement à digne hauteur des enjeux, cela se saurait et on pourrait ici se contenter de gérer. »

« Chers collègues,

Deux ans de crise sanitaire ont bousculé bien des dogmes et pointé cruellement, factuellement, combien près de 20 ans d’application de logiques libérales d’austérité ont fait mal à notre société, à notre république, à notre démocratie comme à notre planète.

  • Dans nos hôpitaux, dans nos EHPAD, dans nos services de secours, à l’école, malgré l’engagement exemplaire des personnels ;
  • Parmi toutes ces professions si utiles, si essentielles, qui ont tenu bon en première ligne malgré des rémunérations au lance-pierre, dans nos commerces, sur nos routes et nos ports, dans le médico-social, les solidarités, la culture ;
  • Au sein de nos collectivités locales ;

Que n’ont-ils pas entendu ces agents publics et ces salariés des activités essentielles, comme témoignages de reconnaissance de leur engagement si précieux, pour les pousser à assumer des plans de charge repoussés parfois au-delà des limites de l’acceptable pour leur propre santé ?

Du quoi qu’il en coûte, aux promesses tintées de l’accent du « plus jamais ça », cette crise annonçait un nouveau modèle de société, plus juste, plus humain, plus écologique, plus à l’écoute.

Or nous en sortons à peine que voilà les promoteurs du monde d’avant reprendre tranquillement comme si de rien n’était. Adieu les belles promesses pour un monde d’après bien meilleur.

Le temps de la crise, la dette ne devait plus être un sujet. Il fallait sauver l’économie par l’intervention publique, comme en 2008. Il fallait la mobilisation, la compréhension, la coopération de la Nation.

Nous en sommes à peine déjà sortis que la facture est déjà prête à être présentée, mais uniquement à celles et à ceux qui ont subi la crise, pas à ceux qui l’ont exploité, qui en ont profité.

A l’arrivée, la pauvreté, la précarité sous toutes ses formes a progressé, les richesses également comme jamais auparavant, malgré la crise, ou même grâce à la crise.

Pour notre Département, à partir des enseignements de deux années de gestion de crise, auraient pu naître un budget départemental 2022 qui aurait eu de la gueule. Non seulement en annonçant un changement de doctrine salutaire, permettant à notre collectivité de prendre toute sa place dans l’amorce d’un changement de société durable et bénéfique.

Mais surtout pour répondre, dans la durée, aux besoins fondamentaux de nos concitoyens. Dans la santé, dans les services publics, pour leur pouvoir d’achat, dans l’éducation, dans la réduction des inégalités.

C’est raté. Ce budget 2022, votre budget 2022, n’est qu’une reproduction de ceux d’avant crise. Bâti sur les mêmes dogmes, enfermé dans les mêmes carcans.

Après un budget 2021 qui était passé totalement à côté de son sujet en décembre 2020 au plus fort de la crise, le budget corrigé en profondeur en avril 2021 à travers le budget supplémentaire, certes très opportunément à quelques semaines des élections, semblait enfin avoir pris la mesure des urgences à couvrir malgré encore quelques grosses lacunes.

Il convient d’ailleurs de souligner que dans la présentation du budget, les comparatifs présentés dans ce rapport avec le budget primitif 2021 sont faussés par les faiblesses des prévisions budgétaires 2021 avant leur correction d’avril 2021.

Dans votre présentation, et j’en fais le pari dans vos diverses interventions à venir dans vos rangs serrés, vous allez nous expliquer que nenni, en égrenant les différents contenus des principaux postes budgétaires.

Cela donne bien sur un gros effet de com aujourd’hui avec des évolutions de BP à BP de certains postes budgétaires utiles de 40, 50 voir 200%…

Nous ne nions pas la réalité de plusieurs leviers utilisés de manière salutaire dans plusieurs domaines :

  • L’augmentation des subventions d’équipements dans le secteur de l’enfance et de la famille, des personnes âgées ou du handicap. Même si force est de constater qu’elles viennent compenser des années de pénuries, et même si nous aurions préféré le même effort pour les subventions d’équipement dans le secteur social ;
  • La couverture enfin obtenue après des mois de mobilisation des revalorisations salariales des personnels des secteurs médico-sociaux ;
  • La création d’une dotation spécifique pour aider les collèges à faire face à l’augmentation de leurs factures de fluides ;
  • ou encore les augmentations des enveloppes dédiées à nos ports, aux communes, à l’habitat ;
  • etc…

J’arrête là, je laisse vos collègues faire la promotion du budget, mais ces exemples viennent simplement rappeler que vous agissez.

Sauf que ce n’est pas notre sujet. Encore heureux qu’avec près de 1,8 Milliards d’euros en caisse, notre collectivité agit, nos services font de leur mieux, des dispositifs existent, d’autres sont créées, les compétences sont assurées.

Nous ne dénonçons aucune incompétence de gestion mais nous contestons vos priorités politiques, les principes libéraux que vous appliquez pour bâtir ce budget, ainsi que votre absence d’audace et d’expérimentation pour faire bouger les lignes.

Et en quoi ce budget et les suivants répondent ou s’éloignent concrètement des attentes, des urgences à traiter en profondeur.

Parce qu’à l’arrivée il y a une question qui est posée : qu’est-ce que ça change si ça ne change rien ? Notamment pour les gens qui souffrent.

Je ne vais pas reprendre ici les démonstrations faites par notre groupe lors du débat d’orientations budgétaires le mois dernier, elles figurent au compte rendu adopté ce matin.

Et même si nous ne pouvions pas espérer être entendu sur tous les sujets, sur toutes nos propositions, en tout cas elles méritaient mieux qu’une fin de non-recevoir.

Car se contenter de bien gérer une administration ne suffit plus.

Il s’agit au contraire de déterminer en quoi une collectivité locale souveraine, dirigée par des élus, peut agir concrètement pour aider au quotidien les gens au-delà des réponses qui existent déjà.

Si ces réponses étaient déjà suffisantes, si elles étaient réellement à digne hauteur des enjeux, cela se saurait et on pourrait ici se contenter de gérer.

Evidement ce n’est pas le cas. Donc comme dans nos communes, les départements doivent agir plus vite et plus loin que l’exercice de leurs compétences administratives.

  • Or voici un budget de 1,3 Milliards en fonctionnement qui en réponse à la crise du pouvoir d’achat n’apporte rien.
  • Qui en réponse aux déserts médicaux et autres pénuries de médecin, n’essaye rien de plus.
  • Qui face à la précarité grandissante auquel une bonne part de notre jeunesse est confrontée, n’expérimente rien. Les crédits de fonctionnement spécifiques à la jeunesse n’augmentent dans ce projet de budget que de 39.000 €.
  • Qui ne prévoit rien de plus pour nos centres sociaux.

Voilà un budget qui ne dit rien sur la nécessité de renforcer nos réponses solidaires de proximité dans les CMS, après un mandat qui aura été marqué par un plan social de près de 500 suppressions de postes.

Recruter une vingtaine de cadres A pour « moderniser les prestations des services » c’est sans doute utile, mais il faudrait tout autant accroitre le nombre de professionnels sur le terrain, au plus près de tous les besoins croissants.

Voilà un budget qui au prétexte que ce n’est pas de notre compétence directe, se contente de concentrer simplement 0,16% de ses ressources pour la santé, donc pour la couverture sanitaire des seinomarins.

Voilà un budget qui veut maintenir le Fonds de Solidarité Logement à sa plus simple expression après l’avoir réformé en 2019, alors même que le nombre de foyers, de personnes isolées qui ne peuvent plus se chauffer correctement augmente.

Voilà un budget qui n’augmente pas les crédits dédiés à la réussite éducative malgré l’augmentation des difficultés rencontrées par nombre de collégiens depuis le début de la crise.

Et franchement, ne pensez-vous pas qu’il serait urgent en ces temps de crise, de rétablir les bourses pour les collégiens que vous avez supprimé ?

Votre budget table sur une baisse des besoins d’accompagnement des plus précaires, les crédits inscrits pour le RSA étant prévus en baisse de près de 22 Millions (moins 7,8%).

Mais plutôt que de croire que d’un coup de baguette magique des milliers de bénéficiaires de cette aide de solidarité au ras des paquettes auraient retrouvé un emploi réel, sans doute faudrait-il se préoccuper du nombre des invisibles aux yeux de la société, aux prises avec la plus grande précarité, sous les radars de tous les dispositifs d’accompagnement dont nous avons porté la voie et les espoirs lors de notre débat d’orientation budgétaire ?

Une action résolue, en lien avec la CAF, doit être conduite pour identifier et contacter les familles qui peuvent prétendre aux dispositifs d’aides et qui ne les sollicitent pas.

Enfin, comment ne pas une nouvelle fois dénoncer la complaisance à l’égard des politiques gouvernementales qui poursuivent leur travail de sape des collectivités territoriales.

Pour rappel, le montant de la dette contractée ces dernières années envers les seinomarins, soit près d’un milliard, dépasse désormais le montant de notre endettement dont vous ressassez une prétendue responsabilité, vieille de 7 ans désormais, alors que les vrais coupables de notre endettement sont aux manettes de l’Etat actuellement.

Sans compter notre perte d’autonomie vis-à-vis d’un Etat bien décidé à recentraliser.

Pour toutes ces raisons notre groupe n’adoptera pas ce budget 2022 parce qu’en résumé, gérer la crise ne suffit plus. Le début d’un mandat est pourtant propice pour un changement de cap et à l’ouverture de nouveaux horizons. C’est l’occasion de se donner des perspectives, tenter de nouvelles réponses, de nouvelles politiques. Occasion manquée. »

Pour télécharger l’intervention de Joachim MOYSE : BP 2022 – JM

Sébastien

Les commentaires sont fermés.