Comme chaque année à même époque, le Conseil départemental du 12 octobre était invité à se prononcer sur l’encadrement des tarifs et des budgets 2024 des établissements et services médico-sociaux pour les personnes âgées, les personnes en situation de handicap, l’enfance, la jeunesse et la famille. Pour le groupe de la Gauche combative, communiste et républicaine, Sophie Hervé a souligné un effort reconduit par le Département pour soutenir les établissements confrontés à la forte hausse des prix, mais a estimé que les décisions proposées ne couvriraient pas la totalité des besoins. Faisant ainsi craindre des tensions budgétaires en cours d’année dans ces services essentiels déjà soumis à de fortes difficultés.
« Monsieur le Président, Chers Collègues,
Cette délibération annuelle est toujours très attendue par les établissements et services médico-sociaux, dans une période où ils élaborent leur projet de budget, parce qu’elle va leur permettre de connaître les décisions prises par leur principal financeur quant à l’évolution des moyens dont ils vont disposer, à travers l’augmentation encadrée de leurs tarifs et de leurs budgets.
Et pour notre collectivité, nous le savons et c’est pourquoi cette délibération fait toujours l’objet de longs débats, elle mobilise un effort budgétaire conséquent et appelle aussi à trouver les moyens nécessaires pour permettre aux établissements d’assurer leurs missions essentielles, sans ajouter de l’anxiété budgétaire et de trésorerie aux multiples difficultés auxquelles ils doivent déjà faire face.
Pénurie de personnel notamment soignants, instabilité des équipes, déficit dans l’offre globale de places d’accueil, pression en termes de réglementation et de responsabilité, et j’en passe.
Des établissements qui se trouvent donc sous tension, dans les secteurs de la dépendance, du handicap ou de l’enfance, parce que pour répondre aux besoins, aux demandes, les politiques publiques ne sont pas à la hauteur.
Au regard des publics concernés, de leur fragilité, c’est complètement aberrant dans un pays qui bat sans cesse des records de richesses, et cela appelle enfin des mesures fortes, lisibles et durables de la part de l’Etat comme des départements.
En tout cas, je pense que nous pouvons tous convenir qu’au regard de leur situation, de leurs difficultés, il est inutile d’en rajouter par des incertitudes budgétaires face à des dépenses en forte hausse.
L’année dernière, et après débat, nous avions convenu de couvrir les surcoûts subis par les établissements en raison de la forte hausse des prix en cette année 2023, à travers une dotation exceptionnelle votée en deux temps, en octobre, puis en juin.
Cette année, vous nous proposez de couvrir, par l’intermédiaire de l’encadrement de l’évolution des budgets, 2,4% d’augmentation de leurs dépenses au titre de l’inflation prévue par l’INSEE pour 2024, auquel s’ajoute 2,5% correspondant à l’impact des mesures de revalorisation salariale.
J’observe qu’en matière d’inflation, c’est toujours l’incertitude qui domine. Ainsi, entre la rédaction de ce rapport et l’actualité, la prévision d’inflation a déjà été revue à la hausse mi-septembre en raison de la progression, une nouvelle fois, des prix de l’énergie.
Nous en sommes actuellement à une prévision de +2,8% pour 2024. Les 2,4% pris en compte dans cette délibération sont donc déjà dépassés avant même leur adoption.
Par conséquent, nous vous proposons tout d’abord de modifier la délibération pour prendre en compte cette nouvelle prévision et ainsi de fixer l’évolution des budgets à +5,5% au lieu du +5% proposé.
Mais également de fixer dès maintenant, et comme nous l’avions fait l’année dernière, une clause de revoyure non pas en juin, mais en mars à l’occasion du vote du budget départemental.
Je me permets à ce propos de faire écho à une remarque pleine de bon sens de notre collègue Florence Thibaudeau-Rainot en Commission. Car en effet, il faut que les établissements n’attendent pas d’avoir la tête sous l’eau pour alerter. Mais de la même manière, il ne faut pas que notre collectivité attende qu’ils aient la tête sous l’eau pour agir.
Dès octobre l’année dernière, puis en décembre, puis en février, puis encore en mars, nous avions alerté sur la situation d’établissements qui ne parvenaient pas à faire face à l’augmentation de leurs dépenses malgré la première dotation votée. Or malgré nos demandes visant à avancer la seconde dotation, il aura fallu attendre fin juin pour voter des fonds complémentaires…
Et je me permets de rappeler ici les termes de la délibération adoptée en juin : « Les fédérations ont alerté (en avril donc juste après le vote de notre budget) le Département sur leurs difficultés pouvant avoir de multiples conséquences telles que la dégradation des prestations auprès des résidents, des réflexions sur la suppression de certains postes… Actuellement, plusieurs établissements se trouvent dans des situations financières très difficiles nécessitant une réponse rapide pour leur permettre de maintenir l’accueil des résidents et les prestations de services. »
Ne reproduisons donc pas la même pression sur les trésoreries des établissements en 2024.
Plus globalement, l’effort financier consenti par notre collectivité pour les aider à faire face à l’inflation, et bien entendu celui en faveur des mesures salariales issues des SEGUR et des conventions collectives, sont indéniables.
Mais, car il y a un mais, depuis 2018, aucun budget nouveau en fonctionnement qui soit supérieur à l’évolution de ces deux postes importants de dépenses n’est attribué aux établissements sociaux et médico-sociaux.
Du coup, les EHPAD par exemple, résistent, stagnent ou même régressent, en tout cas ils ne peuvent pas être dans une dynamique.
Une dynamique où il leur serait possible de mettre en place des mesures nouvelles, d’augmenter leurs effectifs, ou encore de développer une démarche d’amélioration continue de la qualité des prestations délivrées.
Face à ce constat, vous nous répondez souvent par le mot magique : CPOM ! Contrat Pluriannuel d’Objectifs et de Moyens. Le fameux sur-mesure. Sauf que d’après ce qui peut nous remonter des établissements, il s’agit trop souvent de CPO, où l’autorité régulatrice fixe ses objectifs, budgétaires, de gestion etc… En refusant d’accorder des moyens pour financer des mesures nouvelles.
Voilà en résumé les éléments que nous souhaitions mettre en avant à propos de cette délibération qui pourrait mieux faire encore.
Dans l’attente de connaitre les suites que vous réserverez à nos deux propositions, je conclurai sur un dernier aspect qui demeure inquiétant, celui des capacités d’accueil dans les différents secteurs qui nous occupent à travers cette délibération.
Ce rapport annuel nous permet en effet de mesurer l’évolution de l’offre, d’une année sur l’autre, et, concernant cette présente année, force est de constater que les capacités n’évoluent pas et ce malgré les besoins d’accueil non satisfaits. C’est particulièrement vrai dans le secteur du handicap. »
L’amendement proposé par le groupe de la Gauche combative a été rejeté en raison du refus du groupe des droites et de l’abstention des autres groupes.
Un autre amendement visant à établir une clause de revoyure en juin a été également rejeté en raison du refus du groupe des droites.
Pour télécharger l’intervention de Sophie HERVE : Tarification 2024 des établissements – SH
Pour télécharger l’amendement déposé par Sophie HERVE : Tarification 2024 des établissements – Amendement