Pouvoir d’achat : le Département doit être aux côtés des seinomarins !

Pouvoir d’achat : le Département doit être aux côtés des seinomarins !

A l’occasion des débats de politique départementale organisés au début du Conseil départemental du 12 octobre, le groupe de la Gauche combative, communiste et républicaine a choisi d’inviter le thème du pouvoir d’achat, en demandant que le Département soit aux côtés des Seinomarins dans cette période de très forte hausse des prix. C’est Laurent Jacques qui a animé ce débat et fait des propositions concrètes.

« Mesdames, Messieurs, Chers collègues,

Aujourd’hui, je vais vous parler d’Élisa, qui doit remplir le réservoir de sa 206, dont elle sait qu’elle ne lui permet pas de franchir les frontières de la ZFE, et qui s’inquiète surtout de savoir si elle passera le prochain contrôle technique prévu à la fin de cette année.

Élisa paye la cantine pour ses deux enfants et doit faire garder la plus jeune, car son emploi d’aide à domicile, bien qu’à temps partiel, lui impose de recourir à ces services.

Elle croise les doigts pour que le bruit curieux de sa machine à laver ne soit pas synonyme d’une panne à venir. Avec son compagnon, elle compte chaque euro et scrute l’envolée des prix au supermarché. Tous deux lèvent les yeux au ciel quand ils entendent Bruno Le Maire demander un effort aux géants de l’agro-alimentaire.

À eux, on ne demande pas un effort, on l’impose. À eux, on ne destine pas d’aides, ou si peu. Ils dépassent toujours les plafonds de presque rien et ils n’ont donc droit à rien.

Élisa voit bien que nos temps modernes, pas ceux de Charlot, même si le parallèle avec ce film vieux de presque un siècle est frappant, ont engendré un nouveau concept : celui de travailleur pauvre. Celui qui se lève chaque matin pour aller au turbin et qui, le soir venu, crève de faim.

Alors Élisa a peur. Elle redoute de devoir prendre place un jour prochain dans la file d’attente des Restos du Cœur ou d’une autre association qui prodigue l’aide alimentaire.

Elle sait qu’il lui faudrait ravaler sa fierté.

Pourtant, elle est fière Élisa. Et elle peut l’être.

Elle a toujours fait son possible, depuis ses 17 ans, pour s’en sortir, ne rechignant pas sur les petits boulots, ni sur quelques heures au noir pour mettre du beurre dans les épinards. Elle pensait qu’à force de courage, elle se forgerait un avenir modeste, mais radieux.

Aujourd’hui, elle peine à gérer l’urgence.

Celle du jour, c’est de trouver un orthoptiste pour sa petite Alice. Si elle parvient à trouver un professionnel à Dieppe, elle fera 60 km aller-retour à chaque rendez-vous. Si c’est à Rouen, une seule consultation lui coûtera 30 euros rien qu’en carburant, sans compter l’éventuelle amende due à son entrée dans la ZFE…

Alors aujourd’hui, plus que jamais, le Département se doit d’être aux côtés des Seinomarins qui partagent ce quotidien.

Bien sûr, il y a déjà des dispositifs, et ils doivent être reconduits, mais ils doivent surtout être étendus, car à ce jour, ils écartent ceux qui s’en sortaient hier encore, mais qui doivent aujourd’hui choisir entre le chauffage et le contenu du frigo.

Pour cela, nous disposons de plusieurs leviers. Il nous faut les activer de manière durable, simple et efficace. Autrement dit, il nous faut prendre le contrepied d’un gouvernement qui, à grand coup de communication, se contente de saupoudrer et de générer des usines à gaz.

Nous pouvons nous donner les moyens d’une véritable politique de soutien au pouvoir d’achat des seinomarins.

L’intervention sur les tarifs de la restauration au collège est possible, elle est même prévue, mais encore faut-il qu’elle soit judicieuse. Ma collègue Christine Morel y reviendra plus en détail dans la journée, mais plutôt que d’appliquer un tarif unique, basé sur le prix moyen constaté, il faut l’aligner sur le prix le plus bas actuellement pratiqué, et même aller plus loin. Ces tarifs les plus modestes sont appliqués dans les zones où les habitants ont les moyens les plus restreints. Fixer un prix « moyen » revient à leur appliquer une hausse de près de 20 %.

Nous devons aussi créer une 4e tranche dans l’ACRI, l’Aide aux Collégiens pour la Restauration et l’Internat, afin que des familles comme celle d’Élisa, puissent enfin en bénéficier.

Nous pouvons également élargir les conditions d’accès au FSL, le Fonds de Solidarité Logement, là encore, pour venir en soutien aux salariés modestes, et ils sont nombreux. 23% des habitants du Département sont allocataires de la CAF ; 12 % des ménages de Seine-Maritime ont des ressources constituées, pour plus de la moitié des prestations de la CAF. Autant dire qu’ils ont besoin de nous.

Nous pouvons aussi accorder des aides aux bailleurs sociaux pour leur permettre d’augmenter une offre de logement qui, chacun peut le constater, est nettement inférieure aux besoins.

Le nombre de logements augmente en Seine-Maritime au rythme de 6.000 logements chaque année depuis 2017, mais le nombre foyers aussi, ainsi que celui des résidences secondaires progresse bien plus rapidement, surtout dans les secteurs touristiques, ce qui réduit d’autant plus les possibilités de se loger. En la matière, le Plan Départemental Habitat adapté l’an dernier est-il assez ambitieux pour remplir ses objectifs ?

La question de l’alimentation, alors que les prix ont flambé et continuent de progresser, est aussi au cœur des préoccupations de chacun. J’ai évoqué tout à l’heure une association bien connue dans ce registre, mais il ne faudrait pas oublier les centres sociaux qui gèrent des épiceries solidaires ou proposent des paniers de saison à petit prix. Ils ne sont pas médiatisés et peinent de plus en plus à bénéficier de la « ramasse » proposée par les grandes surfaces.

Le directeur du centre social situé au Tréport me confirmait encore il y a quelques jours que, même en se fournissant auprès de la Banque alimentaire à titre payant, il peine à remplir les rayons. Et Bernard Arnault n’est pas venu frapper à sa porte pour lui offrir 10 millions. Là encore, nous devons leur apporter un soutien indéfectible et renforcé.

Nos aides doivent également s’orienter de manière plus sensible vers notre jeunesse pour la soutenir dans ses études. Un « coup de pouce étudiant » avait été apporté en 2021 dans le cadre du Covid, mais ce dispositif pourrait être pérennisé, car, nous le savons tous, les étudiants se trouvent souvent dans une grande précarité. Les soutenir permettrait de réduire, au moins un peu, l’écart entre celles et ceux qui bénéficient de l’aide financière de leurs parents et ceux qui ne peuvent compter que sur eux-mêmes.

Et, comme le proposent à leur tour de nombreux présidents d’Université confrontés à la précarité de leurs étudiants, soyons volontaristes en expérimentant en Seine-Maritime un revenu d’autonomie pour les jeunes.

Plus jeunes, ils ont aussi besoin de nous. Là encore, des dispositifs sont mis en place, et je m’en réjouis, mais il est possible d’aller plus loin, notamment en ré-instaurant le bonus à la Dotation Globale de Fonctionnement accordée aux collèges en fonction du nombre de leurs élèves boursiers d’Etat, ou encore en rétablissant la bourse départementale aux collégiens supprimée par vos soins il y a quelques années.

Nos efforts peuvent aussi porter sur les aides à accorder pour que les Seinomarins, nombreux à ne pas avoir accès aux transports en commun, puissent accéder plus facilement à un moyen de locomotion en adéquation avec les enjeux actuels, je pense tout particulièrement à l’aide pour l’achat d’un vélo électrique, qui pourrait être augmentée.

Les Seinomarins ont besoin de nous. Ils comptent sur nous. Nous ne pouvons pas manquer ce rendez-vous. »

Pour télécharger l’intervention de Laurent JACQUES : Priorité mesures pouvoir d’achat – LJ

Sébastien

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