Session du 26 mars 2013 – Débat de politique générale – Intervention de Nathalie Nail sur les conséquences des politiques d’austérité

Session du 26 mars 2013 – Débat de politique générale – Intervention de Nathalie Nail sur les conséquences des politiques d’austérité

Monsieur le Président, chers collègues,

Lors de notre dernière session, une fois encore, les élus communistes ont alerté, dans cette assemblée, sur les dangers que les politiques d’austérité font peser sur le quotidien des familles seino-marines.

La situation, depuis, non seulement ne s’est pas améliorée mais s’est au contraire aggravée.

Cette situation, que nous n’avons de cesse de dénoncer, valide pleinement notre analyse et valide le vote d’alerte que nous avions émis en nous abstenant sur le budget présenté pour l’année 2013 dans notre collectivité.

Cela renforce notre conviction que l’austérité n’est pas la solution mais bien le problème.

Il est donc urgent de mobiliser toute notre énergie dans la recherche et la mise en œuvre d’alternatives à cette politique d’austérité qui fait si mal à notre peuple.

Les Seinomarins des classes moyennes et populaires souffrent.

Celles et ceux de nos concitoyens qui pouvaient s’en sortir jusqu’à maintenant sont de plus en plus sous la menace du chômage et de la précarité.

La stagnation des salaires, la hausse des prix, les hausses des taxes et impôts comme ceux que vous avez adoptés pour notre collectivité ont une répercussion réelle sur le pouvoir d’achat des habitants de notre territoire.

Quant aux éventuelles surtaxations du diesel ou la fiscalisation voire la baisse des allocations familiales, quelle logique et quel signe politique donné…alors même que vingt milliards d’euros sont offerts sans contrepartie aux grandes entreprises ?

Les associations qui œuvrent au lien social et qui sont essentielles dans la vie de nos concitoyens, sont également touchées.

Ce sont leurs projets qui vacillent, avec là aussi des emplois qui sont supprimés. Les associations de prévention spécialisée en sont le triste exemple, mais seulement le sommet l’iceberg.

Mais ici ou là, dans de nombreuses communes, les critères d’attribution des subventions CUCS – dont on aurait à redire d’ailleurs sur les délimitations du zonage –  se durcissent, et des financements disparaissent. Quel avenir demain pour le tissu associatif dans notre département, dans notre pays ? Les économies d’aujourd’hui couteront cher à la société toute entière demain, j’en suis convaincue…

Les gouvernements de droite qui se sont succédés et leur politique au service du MEDEF et de la haute finance portent certes, la responsabilité de la casse sociale que nous subissons.

Mais aujourd’hui, alors que le premier devoir d’un Gouvernement de gauche, qui devait s’attaquer à la finance, aurait été de revenir sur cette politique, nous n’assistons qu’à un ballet incessant de promoteurs de l’austérité, à tous les étages.

Les conséquences – prévisibles – n’en sont pas moins désastreuses : les chiffres du chômage battent des records sans perspective d’inversion de la courbe à court, moyen et même long terme, la casse industrielle s’accélère, l’investissement public est au point mort.

Mais quelle perspective d’avenir avons-nous dans ce cadre, dans cet étau du pacte budgétaire européen voté à l’unisson dans une alliance contre nature par les parlementaires de la majorité gouvernementale et de la droite rassemblés ?

S’enfermer dans le dogme des 3% est un non-sens économique.

Cette austérité obsessionnelle et ravageuse, est contestée jusque dans les rangs du FMI. S’enfermer dans le dogme des 3 %, c’est condamner le pays à s’enliser dans la crise.

Dans cette situation le Département devrait être la collectivité de la résistance à l’austérité, la collectivité du bouclier social comme vous aimez le rappeler Monsieur le Président,

La collectivité au service du changement pour lequel nos concitoyens se sont majoritairement exprimés il n’y a pas si longtemps lors d’élections majeures dans notre pays.

Les élus communistes au Département sont fidèles à ces engagements qui ont fondé la majorité départementale en 2004, et qui la fondent encore aujourd’hui.

  • Les solidarités comme une priorité incontournable, au-delà du discours,
  • l’aménagement du territoire au service de l’intérêt général et au service d’un      développement ambitieux pour qu’il puisse être durable,
  • la mise en œuvre d’une politique éducative de haut niveau,
  • la culture accessible à tous,
  • la promotion du sport dans les quartiers et dans les villages,
  • la mise en place d’un transport collectif de qualité et à bas prix,
  • la construction et l’accompagnement de la construction de logements publics ;

en résumé un Département au service du développement individuel et collectif des citoyens comme acteurs de leur vie.

Pourtant, c’est un budget au service de la réduction de la dépense publique que vous avez voté.

Alors quel avenir pour le Département ?

Quel avenir alors que vous avez dit construire un budget contraint ?

Quel avenir alors que les dotations aux collectivités vont baisser fortement, de près de cinq milliards d’euros jusqu’en 2015 ?

Quel avenir alors que les lois de décentralisation qui sont en préparation confinent le Département à une collectivité ressemblant à un guichet social sans moyens ni prérogatives.

Les grands schémas qui nous sont notamment présentés aujourd’hui (schéma nautique et plan climat énergie pour ne citer qu’eux) sont appauvris par manque de moyens. N’ayant que peu d’impacts économiques et de structuration du territoire, ils portent en eux, déjà, une certaine forme de renoncement.

Ce qui reste du couple structurant que constituent le Département et les communes en est un exemple criant. Le refus de subventionnement des projets pourtant utiles à nos concitoyens dans les communes inquiète les élus locaux.

Certains, pourtant silencieux, sont membres de cette assemblée. Avec une enveloppe passée de 46 à 20 millions d’euros, il est évident que l’ensemble des besoins ne peut être satisfait. Ici une école est sacrifiée, là la salle de sport, ou l’isolation des bâtiments, etc…

Notre Département n’a-t-il plus de rôle à jouer dans l’aménagement du territoire ? 26 millions d’euros de moins pour les collectivités partenaires, c’est 26 millions d’euros de moins pour les carnets de commande des entreprises qui travaillent pour l’investissement public.

Ce sont des contrats qui ne sont pas signés, ce sont des emplois en moins.

L’objectif politique de cet affaiblissement de la collectivité départementale serait-il de généraliser ce qui se profile en Alsace, ou en Bretagne, une collectivité unique résultant de la fusion des régions et des conseils généraux ? De ce point de vue Alain Le Vern, Président du Conseil Régional, a discuté de cette perspective avec vous. Nous aimerions bien que vous nous fassiez, Monsieur le Président, un bref résumé de cette entrevue, et que vous donniez vous aussi votre position.

Au-delà de cette volonté locale de constituer une baronnie au service du Président de Région, il plane une menace forte sur ce qui fait la force et l’origine des conseils généraux, c’est à dire le découpage cantonal. En imaginant un scrutin inédit dans le monde qui consiste à faire élire deux personnes sur un territoire regroupant plusieurs cantons, c’est une véritable manœuvre antidémocratique qui s’opère avec l’éloignement du pouvoir de décision des citoyens et  l’avènement programmé du bi-partisme.

Au contraire, si la volonté est de renforcer la démocratie et d’établir une réelle parité femme-homme, la solution passe par l’intégration d’une dose de proportionnelle dans ce scrutin.

Autant le redire clairement, NON les élus communistes ne sont pas prêt à sacrifier sur l’autel de l’austérité la collectivité départementale.

La fragilisation de nos politiques a commencé lors de l’adoption, sans le consentement de notre groupe, du plan dit « de consolidation des priorités départementales ». Quand est-ce que sera fait le bilan, quand seront tirées les leçons, quand seront évaluées les conséquences de ce plan ? La délibération prévoyait une évaluation annuelle, nous souhaitons qu’elle soit portée à la connaissance de notre assemblée. Celle-ci nous permettrait de constater la situation, et de redresser le cap.

Au sein de cette assemblée, dans la majorité départementale, bien plus largement que dans les seuls rangs communistes, j’entends ici où là l’approbation de tout ou partie des positions que nous portons.

Nombreux sont les élus locaux, inquiets, sur les bancs de cet hémicycle.

Permettez-moi de dire tout haut ce que vous pensez tout bas …comme nous vous pensez qu’il faut changer de cap.

Eh bien, je vous lance aujourd’hui un appel.

Si le cap doit être changé, vous devez le dire ici, chers collègues, et pas seulement dans les couloirs ou à la sortie de telle ou telle réunion. Ce n’est pas une petite affaire, c’est une vraie question de fond politique.

Les choix européens et nationaux ne sont pas les bons.

Il est de notre responsabilité de ne pas les accompagner mais au contraire de faire les choix courageux qui protègeront les seinomarins des conséquences de la crise que le pays traverse.

Les chypriotes, les grecs, ces peuples sont la preuve par l’exemple de la nocivité des politiques d’austérité. Nous voyons aujourd’hui dans quel état de déliquescence sont ces pays.

D’autres choix, à gauche, sont possibles, comme ce fut le cas au Sénat où socialistes et communistes votaient ensemble une loi interdisant les licenciements boursiers. Pourquoi ne pas la reprendre aujourd’hui ?

Cette loi a été déposée à l’Assemblée Nationale et au Sénat par les parlementaires du Front de Gauche. Les huit articles de ce texte sont le fruit d’une co-élaboration avec les salariés de notre pays. Ils sont le fruit de l’intelligence collective des travailleurs. Il s’est appuyé sur l’apport et l’expertise de terrain de très nombreux syndicalistes et représentants d’entreprises en lutte, comme les Sanofi, les Fralib, les Petroplus, les Legrand, les Renault…

Ce texte vise à réajuster le droit du travail pour faire face à la finance, en redéfinissant les motifs de licenciement acceptés. Il prévoit également que les licenciements sont jugés abusifs, sans cause réelle et sérieuse, si l’entreprise ou l’usine a constitué des réserves ou un bénéfice net au cours des 2 dernières années, ou si elle a distribué des dividendes, des stocks options ou procédé à des rachats d’action. Il demande le remboursement des aides publiques lorsque le licenciement aura été jugé sans cause réelle et sérieuse. Le texte remet aussi en cause la procédure de rupture conventionnelle, véritable licenciement déguisé qui a concerné plus d’un million de salariés depuis 2008.

Voilà la première boîte à outils dont doit se saisir la gauche pour appuyer son action au service de l’emploi ! Ce texte sera présenté à la mi-mai au Parlement. La gauche s’honorerait à adopter cette loi aujourd’hui, puisqu’elle a la majorité pour le faire.

Les Français, les Seino-Marins, de Dieppe au Havre, de Rouen à Elbeuf, de Lillebonne au Trait, de Yerville à Neufchâtel en Bray, n’ont pas porté la gauche au pouvoir pour qu’elle cède au monde de la finance.

Les marchés financiers ont tout sauf un visage humain.

L’Humain d’abord, tel doit être notre objectif commun.

Au Département de Seine-Maritime comme en France, changeons de cap.

Il en est encore temps !

Olivier

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