Comme chaque année à la même époque, le Conseil départemental était invité, lors de sa séance du 5 décembre, à délibérer sur l’actualisation du programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie (PRIAC) 2024-2028 préparé par l’Etat et son Agence Régionale de Santé (ARS). Les élus de la Gauche combative, communiste et républicaine ont voté contre ce document programmatique expliquant que ce qu’il contient est notoirement insuffisant. Sophie Hervé en a fait l’analyse…
« Mes chers collègues,
Après avoir souligné au passage que ce document manque singulièrement de visibilité, dans un domaine où nous en avons pourtant bien besoin, tellement les besoins d’accueil, d’hébergement et d’accompagnement des personnes en situation de handicap et des personnes âgées en perte d’autonomie sont grands et pressants, le moins que l’on puisse en dire c’est qu’à ce rythme pour y répondre, nous ne sommes pas sortis de l’auberge.
Passez-moi cette expression, mais année après année depuis le début de ce mandat, j’ai l’impression que l’Agence Régionale de Santé y va à coups de sauts de puce comme si elle tentait de gérer tant bien que mal la réponse aux attentes à satisfaire qui s’accumulent.
Je pense bien sûr aux places en IME, 1.900 orientations restant sans réponse ;
Je pense aux moyens supplémentaires à mobiliser pour que les annonces répétées chaque année d’une école inclusive qui ne laisse aucun gamin sur le bord du chemin soit enfin une réalité concrète ;
Je pense aux places d’accueil et d’hébergement pour les jeunes, les adultes et les adultes vieillissant en situation de handicap avec des démarches des familles qui virent au parcours du combattant et des absences de solution qui entrainent des situations personnelles et familiales parfois humainement dramatiques…
Tout ce qui est indiqué dans cette actualisation du PRIAC est bon à prendre mais nous sommes très loin du compte.
Alors que le propre d’un document programmatique pluriannuel devrait être de donner clairement des perspectives pour résorber les pénuries. A grand renfort de communication, les gouvernements annonçaient des solutions nouvelles, autant dire qu’au train où ça va, il n’y en aura pas pour tout le monde !
Avant d’aborder la question des EHPAD et de regretter encore une fois l’absence d’une loi Grand-âge maintes et maintes fois annoncée, maintes et maintes fois reportée, je souhaiterais vous permettre de clarifier un point qui reste obscur concernant ce qui est annoncé dans ce document au sujet du manque de places en IME.
Au regard du nombre de besoins à satisfaire dont je viens de rappeler le nombre, il aurait été logique de lire dans ce rapport une volonté de créer des places supplémentaires. Or, il est dit que sera privilégié le fait de libérer des places, on pourrait lire tout autant « faire de la place » dans les IME, ce qui sous-entend le départ des IME de jeunes adultes.
La question à laquelle je ne trouve pas la réponse dans ce document, est : combien de personnes concernées et que vont-elles devenir ?
J’en arrive à la situation des EHPAD dont le point commun est qu’ils se trouvent tous en difficultés.
Chacun sait que parmi ces difficultés, il y a celle de la pénurie de personnels soignants qui entraine des problèmes de recrutement, une absence préjudiciable de stabilité des équipes et un recours couteux aux solutions d’intérim.
Dans ce PRIAC, il n’y a pas un mot sur ce qu’envisage l’ARS pour solutionner ou tout du moins atténuer cette difficulté.
En revanche, il acte parce que la loi l’a acté, le renforcement des temps de présence des médecins coordinateurs avec les financements qui vont avec.
Sauf que ces médecins coordinateurs il n’y en a pas assez, des EHPAD aujourd’hui en sont pour certains totalement dépourvus et tentent de palier avec les moyens du bord.
L’ARS aura ensuite beau jeu lors de ses inspections de souligner l’absence de conformité des établissements aux protocoles de soin… De qui se moque-t-on ?
Toujours pour les EHPAD, ce PRIAC entend agir en amont avec le développement des CRT (Centres de Ressources Territoriaux), c’est l’alternative à domicile d’un accueil en EHPAD. Bien. Sauf que cela accroit les missions des équipes des EHPAD déjà bien chargées. De plus, l’ARS n’agit pas en aval puisque les EHPAD continuent à devoir garder des résidents dont les pathologies ne révèlent plus d’un EHPAD mais de l’hôpital…
Là encore cela nous semble, en matière de politiques programmatiques, relever de la navigation à vue.
En conclusion, notre groupe est particulièrement réservé quant au contenu de ce PRIAC notoirement insuffisant et à notre goût trop confus. A moins que la confusion ne soit finalement qu’un aveu de faiblesse… Nous voterons donc contre cette délibération. »
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Concernant les absences de solution en IME, la Vice-Présidente en charge des solidarités a répondu qu’il s’agit en fait de 750 enfants environ, « ce qui est déjà énorme », mais dont les demandes sont placées en liste d’attente dans plusieurs IME, d’où l’explication du chiffre de 1.900 demandes indiqué dans ce rapport. Elle a rappelé la nécessité de trouver des solutions d’accueil hors IME pour les adultes qui y occupent des places bénéficiant ainsi de l’amendement Creton. Elle a précisé que la place qu’un adulte libère en IME pouvait couvrir jusqu’à 3 accueils d’enfants, en raison du niveau d’accompagnement qu’il nécessite. Mais elle a garanti que ce travail se faisait sur mesure et que l’utilisation du terme « libérer des places » indiqué dans le rapport était maladroit.
Concernant les pénuries de médecins, et notamment dans les EHPAD, elle a répondu partager les remarques et constats.
A l’issue d’un long débat, la délibération a été finalement adoptée par la majorité des droites, accompagnée de fortes réserves, le groupe socialiste et le groupe des écologistes s’étant abstenus, le groupe des élus de la Gauche combative, communiste et républicaine a voté contre.
Pour télécharger l’intervention de Sophie HERVE : PRIAC 2025 – SH