Le Contrat de Réussite Educative départemental (CRED) est un dispositif précieux qui n’existe pas à cette hauteur dans tous les départements. Un dispositif conçu en 2006 par Sébastien Jumel, lorsqu’il était vice-président du Département, qui a fait depuis largement ses preuves. Une enveloppe financière déterminée par le Département en faveur de chaque collège, permet aux équipes éducatives de développer des projets pédagogiques et des activités qui favorisent la réussite éducative.
Sous prétexte que certains collèges utilisent plus cette enveloppe que d’autres, la majorité de droite a décidé de réformer le mode de calcul du CRED. Résultat, des collèges utilisant utilement ces crédits vont se voir pénaliser par une baisse de leur enveloppe, alors même que les enjeux de la réussite éducative devraient générer des hausses de moyens à mobiliser. Derrière cette réforme se cache en réalité une économie budgétaire escomptée par le Département…
Un tour de « passe-passe » dénoncé par les élus de la Gauche combative, communiste et républicaine qui ont voté contre cette réforme, comme Séverine Botte s’en est expliquée.
Puis Nicolas Langlois a tenu à son tour à dénoncer cette mauvaise réforme qui pénalise les collèges fortement engagés dans les projets de réussite éducative.
« Le Contrat de Réussite Éducative départemental est un dispositif précieux et qui n’existe pas à cette dimension dans tous les départements. Et nous pouvons en être fiers.
L’ambition de Sébastien Jumel, à l’origine de ce dispositif lorsqu’il était vice-président du Conseil général, était d’accompagner chaque élève tout au long de son parcours de collégien, quel que soit ses origines sociales, mais aussi de faire évoluer les pratiques de réussite éducative à destination des jeunes en difficulté.
L’objectif initial, présenté en commission exceptionnelle et à laquelle j’ai participé, est louable et qui, pour l’enseignante que je suis, me tient particulièrement à cœur : donner les mêmes chances de réussite à tous les élèves quelque soit leur parcours, leur localisation géographique etc…
C’est pourquoi ma première réaction était d’accueillir positivement cette refonte du CRED.
Puis à tête reposée, après remarques de Principaux de collèges, et après discussions avec mes collègues, chiffres à l’appui, il nous est apparu que l’objectif de départ n’était peut-être pas aussi louable qu’il ne laissait paraître.
Si je prends l’exemple du collège Camus à Dieppe, établissement classé en REP+, le CRED permet d’impulser une dynamique en faveur des élèves et à partir du travail et des projets définis par les équipes de l’établissement. Il a permis à des centaines d’élèves défavorisés d’accéder à la culture, au sport, à la formation citoyenne (séjours mémoriels notamment), au parcours « avenir » mais aussi « linguistique ».
Mais aujourd’hui, au nom d’un principe d’« équité » affiché, comme cela a déjà été le cas pour la fixation du tarif unique de restauration ayant entraîné la hausse des tarifs de cantine dans 28 collèges sur 109, vous allez fixer des collèges gagnants et des collèges perdants des dotations pour le CRED.
Et pour reprendre l’exemple du collège Camus, les équipes vont être punies pour avoir permis à leurs élèves de s’épanouir dans cette société d’austérité, plus que dans d’autres collèges ces dernières années.
Pourtant on parle ici de réussite éducative qui mérite en effet des moyens accrus, mais certainement pas des baisses.
Certes, un nombre certain d’établissements vont voir leur enveloppe maximale autorisée augmenter, mais ce que vous ne dites pas, c’est qu’ils ne consomment déjà pas leur budget actuel en totalité.
Prenons l’exemple de Boos : il a un potentiel de subvention de 8.059€ mais dans les faits il en utilise que 5.389€. Et bien demain, si votre réforme est votée, il aura un potentiel de 22.170€.
Comment imaginer que les équipes qui ne dépensent déjà pas la plupart des subventions possibles utilisent encore plus de subventions ? Alors que par ailleurs, plusieurs établissements consomment la totalité de leurs subventions mais voient leur dotation potentielle réduire drastiquement.
On l’a vu pour le collège Camus de Dieppe qui utilisait la totalité de sa subvention à savoir : 28.883€, mais qui demain risque d’être condamné à un potentiel de 13.211€.
De même pour le collège de Gruchet-Saint-Siméon avec un potentiel et une utilisation de sa subvention de 30.988€ utilisée, mais avec un potentiel à venir de 17.073€.
Donc d’un côté on propose plus à ceux qui n’utilisent déjà pas le possible, et d’un autre coté on enlève beaucoup à ceux qui consomment tout.
On voit bien le tour de passe-passe qui n’ose pas dire que vous allez faire des économies. Donc peut-être faut-il faire des économies – après tout votre gouvernement nous promet 45 milliards euros d’économies – mais dans ce cas vous l’assumez, en faisant en sorte que cela soit ressenti de façon juste.
Parce que nous sommes, en effet, bien sur une diminution du budget, car nous passons de 2,251 Millions d’enveloppe théorique à 2 Millions.
Le bulletin d’information aux agents départementaux parle même d’une diminution plus importante en annonçant un budget prévisionnel de 1,8 Millions.
D’ailleurs, je me permets de souligner qu’annoncer dans ce bulletin une refonte du CRED avant qu’elle ne soit votée, nous semble non seulement imprudent mais aussi pas très respectueux de la vie démocratique de notre assemblée. Et ce n’est pas la première fois que nous vous faisons la remarque.
Donc la vraie question que vous nous posez via cette délibération ne concerne pas seulement le bien-être de nos élèves et de nos équipes pédagogiques mais plutôt comment faire des économies tout en affichant un budget presque constant…
Nous voterons contre cette délibération. »
Après un large débat et de nombreuses réserves émises sur cette réforme, la délibération a finalement été adoptée uniquement par la droite et le groupe des deux élus « indépendants » du canton de Bolbec. La Vice-présidente en charge de l’éducation a cependant concédé une évaluation de la réforme, avec clause de revoyure, proposée par les élus de gauche.
Pour télécharger l’intervention de Séverine BOTTE : Réforme du CRED – SB