Les politiques gouvernementales hostiles aux collectivités locales étaient, le mois dernier, au coeur du débat d’orientations budgétaires qui a animé le Conseil départemental. Un mois plus tard, à l’occasion d’une délibération portant sur l’accompagnement financier des aides à la vie partagée (AVP), l’Etat s’illustre par une baisse de son financement que le Département devra compenser sur son propre budget. Mais cette fois, pas un mot dans les rangs de la majorité de droite pour dénoncer cette décision, ni pour s’associer à la démarche collective que Christine Morel a proposé en direction du gouvernement…
Pour visionner l’intervention de Christine MOREL : Habitat partagé et AVP vidéo – CM
« Monsieur le Président, Chers Collègues,
L’habitat inclusif et l’accompagnement qu’il nécessite à travers les services et projets financés par les AVP, les aides à la vie partagée, sont des sujets qui avancent bien, à partir d’un bon travail partenarial. L’installation en 2020 de la conférence des financeurs de l’habitat inclusif (CFHI) 76 en est l’une des illustrations.
L’habitat inclusif ne constitue pas qu’une alternative entre le maintien dans son logement, et le logement en établissement, mais il développe une nouvelle forme d’habitat en favorisant le bien vivre dans et grâce à son environnement immédiat.
Il est aussi, un levier utile pour rompre avec l’isolement et créer des liens.
C’est exactement aussi le rôle des Résidences autonomies présentes de longue date dans de nombreuses communes, sous l’impulsion des municipalités et de leurs CCAS et je sais Madame la Vice-Présidente que vous y êtes très attentive.
Malheureusement l’accompagnement qui leur est réservé est très différent. Si je prends l’exemple d’Harfleur, la résidence portée par le CCAS et donc la mairie concerne environ 76 habitants. L’année dernière, le forfait autonomie annuel que nous avons perçu est de 23.226€. Et cela pour mettre en place des actions favorisant le lien social, l’inter-généralité ou encore des actions bénéfiques pour la santé de nos résidents soit 305€ annuel par habitant. Vous conviendrez que l’aide est très éloignée du montant prévu dans ce rapport.
Les 16 nouveaux projets d’AVP, que nous saluons bien évidemment, vont concerner 134 habitants sur le Département.
Je souhaite être très clair dans mes propos. Il ne s’agit pas d’opposer ces types d’hébergement qui d’ailleurs sont complémentaires, mais de rappeler que tous méritent d’être accompagnés par l’Etat et par le Département.
Et je regrette que les RPA ne puissent plus répondre à cet appel à projets.
A croire que dans ce domaine tout est créé depuis peu à travers l’habitat inclusif et leurs AVP largement financés par le Département et par l’Etat.
Sauf que le fossé se creuse entre ces types d’habitat. Avec d’un côté des projets essentiellement portés par des associations, des bailleurs et des entreprises spécialisées qui apparaissent mieux financées, et des projets portés par les communes à travers leurs Résidences autonomies mais qu’elles sont souvent les seules à financer bien qu’ils concernent pourtant beaucoup plus de résidents.
Je crains qu’il n’y ait un décrochage et une perte d’attractivité des Résidences autonomies. Or je rappelle que dans les communes qui disposent d’une Résidence autonomie, le nombre de personnes concernées est sans commune mesure avec le nombre de personnes concernées par les projets d’habitat partagés.
De plus nous savons que dans notre département, le vieillissement de la population est une réalité et que rapidement nous nous trouverons encore une fois face à un mur. Que l’on diversifie l’offre d’habitat est une bonne chose mais ne perdons pas de vue les besoins en privilégiant quelques projets au détriment de réponse existante sur notre territoire.
L’autre aspect que je souhaite développer concerne le désengagement de l’Etat que cette délibération acte, même si curieusement, elle ne le dit pas.
Les AVP déjà validés sont actuellement financée à 80% par l’Etat et 20% par le Département.
Désormais l’Etat va diminuer son financement suite à la loi de financement de la Sécurité Sociale 2023 : de 80% de participation pour les projets 2022 à 50%, de 65% à 50% pour les projets 2023 et 2024, et 50% d’emblée pour les projets à partir de 2025.
L’ARS pourra par contre financer, mais à la marge.
Cette diminution de financement, qui était prévue, ne s’appliquera donc pas qu’aux nouveaux projets mais concerne aussi les projets déjà validés.
La différence sera, du coup, supportée par notre collectivité qui va y consacrer beaucoup d’euros.
Compte tenu des difficultés et du contexte dégradé qui pèsent sur les finances du Département, des alertes de notre collègue en charge des finances lors du Débat d’orientation budgétaire, nous ne comprenons pas pourquoi cette délibération vient acter cette charge supplémentaire en raison de la diminution de la participation de l’Etat, sans même la dénoncer !
En Commission, nous vous avons proposé que tous les groupes s’associent pour écrire au 1er Ministre afin de regretter ce transfert de charge et demander un retour aux financements d’origine dès la prochaine loi de finances de la Sécurité Sociale.
Nous renouvelons en séance cette proposition. »
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